Après avoir passé son adolescence et le début de sa vingtaine dans un gang à vendre de la drogue et à s'attirer des ennuis, Jordan Buna a repris sa vie en main. Aujourd'hui, il fait du bénévolat pour la police et parle de son expérience aux jeunes. Il a expliqué à Deidre Seiden, rédactrice à la Gazette, comment il espère que son histoire les incitera à faire de bons choix.
Pourquoi êtes-vous entré dans un gang?
Parce que je m'ennuyais et que j'étais idiot. J'aimais ça, c'était épeurant et excitant. À l'école secondaire, on avait peur de moi et j'avais l'impression qu'on me respectait. Mais après un certain temps, la lune de miel était terminée. Les policiers ont fini par savoir qui j'étais et se sont mis à me harceler. J'ai commencé à accumuler les accusations criminelles et à me faire des ennemis. À 24 ans, j'avais des tas d'ennuis et je me suis retrouvé en prison.
Qu'est-ce qui vous a poussé à vous en sortir?
Je crois que les mauvaises expériences que j'ai eues m'ont aidé à prendre de la maturité. Le jour où j'ai reçu une peine d'emprisonnement pour possession d'une arme à feu a été décisif pour moi. En prison, j'étais obligé de passer toute la journée avec des gens qui ne me ressemblaient pas finalement. Je ne me sentais pas à ma place.
Quel rôle jouez-vous auprès des jeunes?
Je vais, entre autres, dans les écoles avec le serg. Lindsey Houghton de l'Unité mixte d'enquête sur le crime organisé (UMECO) en C.-B. pour parler aux jeunes des choix que j'ai faits et qui m'ont amené à entrer dans un gang.
Je veux inciter les jeunes à réfléchir lorsqu'ils se trouvent avec des amis dans une situation où ils pourraient avoir des ennuis. Ce n'est pas toujours une partie de plaisir. En leur racontant mon histoire, j'essaie de leur faire comprendre que chaque mauvais choix peut avoir de graves conséquences sur leur vie actuelle et future. Bien des jeunes ne pensent pas à ça.
Comment les jeunes réagissent-ils à vos exposés?
Ils sont très attentifs. On pourrait entendre une mouche voler pendant toute la durée de mon exposé, que je présente sous la forme d'un récit. Les jeunes ne veulent pas entendre parler de faits et de chiffres pendant une heure. À la fin de l'exposé, ils sont absorbés par l'histoire et ils sont toujours nombreux à venir nous voir pour nous poser des questions.
Quelles questions vous posent-ils?
Ils me demandent parfois si j'ai peur qu'on s'en prenne à moi. Il est si facile de répondre à cette question. Je n'ai pas peur. Je m'en suis sorti il y a des années. Tous ceux qui étaient dans le milieu des gangs à l'époque où j'en faisais aussi partie sont morts ou passeront leur vie en prison. La vie est courte quand on est dans ce milieu.
Pourquoi avez-vous décidé de raconter votre expérience?
En aidant les autres, j'essaie de transformer tout ce que j'ai vécu en quelque chose de positif.
Je réussirai peut-être à amener des jeunes à décider de ne pas choisir la même avenue que moi, à se dire que ce n'est pas ce qu'ils veulent faire de leur vie.
Selon vous, le message que vous transmettez aux jeunes est-il plus efficace que celui diffusé par la police, par exemple?
Je pense qu'une grande partie de mon expérience touche les jeunes parce que je leur parle de ce que j'ai vécu de la sixième année jusqu'à aujourd'hui. Je choisis de parler plus longtemps de mon passage à l'école que de mes années dans un gang pour que les jeunes constatent les nombreuses similitudes entre leur expérience et la mienne. Ils voient comment chacun de mes choix me nuisait et que plus ça allait, pire c'était. La collaboration entre Lindsey et moi est très efficace : il commence par donner le point de vue de la police sur les gangs et après, je raconte mon histoire en donnant mon opinion sur ce que les policiers connaissent des gangs.