Il est 3 h, un patrouilleur tombe sur une jeune fille de 16 ans dormant sous les voies du SkyTrain à Surrey (C.-B.). Elle est blottie dans une tente avec deux hommes sans-abri dans la quarantaine. La jeune fille a des problèmes de santé mentale et de toxicomanie, elle n'a pas été à l'école depuis des mois et, elle est enceinte.
En temps normal, les policiers auraient demandé à des travailleurs sociaux locaux de s'occuper d'elle. Cependant, la GRC de Surrey vient de mettre sur pied un programme d'intervention visant à mieux traiter les appels liés à des problèmes sociaux dans le centre-ville.
Le Groupe de mobilisation et de rési-lience de Surrey (GMRS) n'attend pas que les incidents surviennent — le programme proactif cible des personnes instables pour éviter qu'une intervention d'urgence soit nécessaire.
Le programme regroupe des représentants de l'application de la loi, des services correctionnels, des services de logement, d'enseignement et de santé ainsi que des services sociaux afin d'aider les résidants à risque à obtenir le soutien nécessaire pour vivre en sécurité et éviter les ennuis.
« Il s'agit de regrouper tous les services et les ressources nécessaires afin de pouvoir les mettre en œuvre rapidement, affirme Morten Bisgaard, gestionnaire au ministère du Développement social et de l'Innovation sociale de la C.-B. et coprésident du GMRS. Dans ces situations, une personne pourrait subir de graves préjudices si nous n'intervenons pas très rapidement. »
Processus de prévention
En 2014, plus de 60 % des appels de service reçus par le Détachement de Surrey concernaient des problèmes sociaux comme la toxicomanie, la pauvreté, le sans-abrisme et les maladies mentales. Les policiers, souvent non formés pour gérer ces problèmes, pouvaient seulement aiguiller ces résidants vers les différents services sociaux.
En 2015, la GRC a fait appel à des professionnels de tous les domaines des services sociaux de Surrey pour créer le GMRS. Le but est de repérer les personnes les plus à risque – celles qui manquent constamment de soins de santé, de revenus et de ressources indispensables – et de les aider avant qu'elles aient des démêlés avec la police ou se retrouvent à l'hôpital.
Les membres du GMRS se réunissent chaque mardi matin pour discuter des cas à risque élevé que leurs organismes ne peuvent gérer seuls.
« Si nous voulons sauver des vies, nous devons discuter de ces personnes ensemble, souligne l'insp. Ghalib Bhayani, agent de soutien et de sécurité communautaires à Surrey. Grâce au GMRS, lorsque le cas de cette fille de 16 ans a été présenté, plusieurs personnes étaient prêtes à assurer son bien-être. »
Lorsque le GMRS s'occupe d'une affaire, les membres des organismes concernés se rendent à Surrey pour rencontrer la personne à risque. Une intervention est effectuée dans les 48 heures suivantes, ce qui comprend la localisation de la personne et l'offre de ressources.
« Nous n'aurions pas accès à bon nombre de ces personnes sans le GMRS, ajoute M. Bisgaard. Sans notre aide, ces personnes pourraient mourir ou se blesser gravement. »
Création d'un réseau
Le GMRS s'inspire d'un modèle intégré — une approche préventive axée sur la collaboration afin de réduire la criminalité. Depuis sa mise en œuvre à Prince Albert (Sask.) en 2011, le modèle intégré a été adopté dans 55 communautés au Canada, Surrey étant la plus récente.
Le GMRS a déjà réussi 70 interventions. Selon Jodi Sturge, directrice exécutive adjointe de la Société d'aide d'urgence Lookout, qui offre de l'hébergement aux résidants à faible revenu, le GMRS constitue un bon moyen d'échanger de l'information qui ne le serait pas autrement.
« Nous avons discuté du cas d'une personne et lorsque nous sommes partis à sa recherche, elle était introuvable et sans domicile. Quand nous sommes allés à sa rencontre avec des membres de la GRC, ceux-ci ne connaissaient pas l'endroit et ils ont été secoués d'apprendre que des gens y vivaient, explique Mme Sturge. Nous avons appris à mieux connaître nos champs d'expertise. »
Mme Sturge ajoute que le GMRS aide aussi la GRC à envisager les situations du point de vue du soutien plutôt que de la répression.
« Notre travail comporte beaucoup d'interventions d'urgence; cette façon de faire est donc nouvelle pour nous, poursuit Mme Sturge. La communauté sait mainte-nant que nous existons. »
Surrey planifie déjà élargir les cadres du GMRS au-delà du centre-ville afin d'entrer en contact avec plus de résidants.
En ce qui concerne la jeune fille de 16 ans dormant sous le SkyTrain, M. Bhayani affirme que le GMRS est la première étape visant à s'assurer qu'elle est en sécurité et sur le droit chemin.
« Nous lui offrirons toutes les possibilités, notamment un logement, de l'enseignement et des soins de santé, y compris des soins prénataux, pour qu'elle et son bébé réussissent dans la vie. »