Les cadets de la GRC quittent Dépôt pleins de dynamisme, d'espoir et d'optimisme. Beaucoup gardent cette attitude au fil de leur carrière, mais certains voient s'émousser leur enthousiasme et leur motivation. Nous avons demandé l'opinion de quatre employés de la GRC sur le maintien de la satisfaction professionnelle à l'appui d'une carrière longue et gratifiante.
Les experts
- Karine Labranche, gestionnaire, station de transmissions opérationnelles de la GRC, Westmount (Qc)
- Comm. adj. Jasmin Breton, commandant de la Division Dépôt, Regina (Sask.)
- Gend. Guillaume Martel, détachement de la GRC à Grande Prairie (Alberta)
- Julie Gallant, conseillère en ressources humaines de la GRC, Fredericton (N.-B.)
Karine Labranche
L'enjeu du maintien de l'effectif suscite aujourd'hui un vif intérêt qui n'a rien d'étonnant. Alors quelles sont les meilleures stratégies de motivation du personnel? Comment assurer, en tant qu'organisation, la fidélisation d'employés talentueux aux origines diverses? Bonne question!
Je supervise les employés de la station de transmissions opérationnelles (STO) de la GRC depuis plus de dix ans, et je crois que le secret est de s'intéresser à la personne derrière le titre de poste.
Qu'on soit opérateur, policier ou adjoint administratif, on a tous en commun le fait d'être humain. Le personnel de la GRC représente son plus grand atout, et la façon dont elle traite ses gens influe directement sur le rendement, la motivation, l'implication et la fidélisation.
Les gestionnaires ont donc le pouvoir de favoriser le maintien en poste chaque jour dans l'exercice de leurs fonctions.
Une personne que je respecte énormément m'a déjà dit que, pour un gestionnaire, il importe surtout de posséder de solides compétences générales plutôt qu'un savoir technique. Ces compétences alliant aptitudes sociales, habiletés de communication, traits de caractère personnels et intelligence émotionnelle peuvent à mon avis grandement influencer les gens autour de nous.
Selon mon expérience, ce sont les petits gestes qui comptent. Plus que les mots.
Qu'on s'efforce d'établir de véritables liens avec les gens (en prenant le temps d'écouter et de soutenir) ou qu'on favorise un climat de travail positif (en participant aux activités quotidiennes et en offrant rétroaction et reconnaissance), il est important de montrer son engagement envers les employés. Croyez-moi, tous ces efforts comptent. Beaucoup.
Il faut constamment faire de l'introspection et choisir la personne qu'on veut être, pas seulement comme dirigeant de son service, mais aussi comme ambassadeur de la GRC. C'est exigeant, mais on trouve sa récompense dans la loyauté, l'implication et la productivité des employés. Je le répète : les leaders ont le pouvoir d'influencer les gens, et aujourd'hui, les enjeux sont de taille.
Je ne nie pas que d'autres facteurs contribuent aussi à la satisfaction professionnelle, dont la formation et le perfectionnement, l'autonomie, les bases profondes de notre vocation, le sentiment de changer les choses et la clarté du mandat et de la mission de l'organisation.
Je suis également consciente du fait qu'il y a plein de facteurs externes sur lesquels nous avons peu d'emprise, comme la rémunération et les avantages sociaux. Aussi faut-il plutôt mettre l'accent sur notre sphère d'influence immédiate.
Nous avons vécu des périodes difficiles à la STO ces dernières années, en raison notamment de problèmes de recrutement et de fidélisation sans doute semblables à ceux que vivent d'autres sections. Mais je suis fière de dire que nous les avons traversées avec succès. Ensemble.
Comment pouvons-nous garder nos employés?
En nous concentrant tout simplement sur les gens.
Comm. adj. Jasmin Breton
Le succès actuel et futur de notre organisation dépend de sa capacité de garder des employés talentueux et motivés venant d'horizons divers. La fidélisation est une notion que tous les employés, y compris les superviseurs, les gestionnaires et les cadres, doivent bien saisir.
Parmi les très nombreux facteurs qui contribuent à la fidélisation, j'en ai choisi cinq qui méritent à mon avis un peu plus d'attention.
Tout d'abord, il faut établir dans toute l'organisation un climat de travail sain et positif, qui fait que les gens se sentent respectés et valorisés. Le principe « Nos gens d'abord » du plan Vision150 nous aidera à guider la GRC vers un succès durable. Nous avons tous intérêt à favoriser ce climat de confiance et de respect. Il est facile de critiquer l'organisation, mais j'invite plutôt les employés à contribuer activement à faire de la GRC un lieu de travail de choix aux yeux de ses employés actuels et futurs.
Deuxièmement, je crois que les employés tiennent à pouvoir apprendre et s'épanouir au sein de l'organisation. Superviseurs et gestionnaires doivent leur proposer un parcours d'apprentissage assorti de certaines attentes. Ce parcours doit naturellement prendre en compte la volonté de l'employé de suivre des formations et d'accepter de nouvelles affectations stimulantes. Le Programme de remboursement des frais de scolarité est une belle façon de donner la chance aux employés de suivre des cours en dehors du travail pour avancer au sein de l'organisation.
En troisième lieu, il faut reconnaître les contributions de nos gens. Outre la conscience du travail bien fait, de nombreux employés aiment que leurs bons coups soient soulignés au vu et au su de tous. On peut le faire en passant par les voies officielles, notamment le Programme de reconnaissance et de distinctions hono-rifiques, mais c'est loin d'être la seule possibilité. Nous devons montrer entre nous l'importance accordée au travail formidable accompli chaque jour et célébrer continuellement nos réalisations dans des cadres officiels et informels.
La confiance est le quatrième élément qui favorise la fidélisation. Les employés doivent sentir qu'on leur fait confiance, et les gestionnaires doivent comprendre l'importance de montrer leur propre vulnérabilité. Il faut créer un climat d'ouverture où chacun prend le temps d'écouter son prochain. Pour avoir participé à des sports d'équipe dans mon enfance, je sais combien il est précieux de pouvoir compter en tout temps sur mon superviseur, mes pairs et mes subalternes.
Finalement, on doit autonomiser les employés et leur offrir des possibilités de leadership. Les egos doivent rester au vestiaire. Chacun devrait entrer à la GRC en sachant qu'il a un rôle de leadership à jouer dans son propre milieu de travail. Il faut mettre l'accent sur le développement du leadership au moyen de séminaires, de cours et de possibilités de mise en pratique. Dans le contexte actuel où le taux d'attrition grimpe et le recrutement piétine, nous devons miser davantage sur la fidélisation. Les éléments susmentionnés ne sont que quelques exe-mples des mesures que nous prenons (ou des points à améliorer) pour offrir un milieu plus intéressant.
Nous avons tous un rôle à jouer pour faire en sorte que la GRC reste un employeur de choix.
Gend. Guillaume Martel
Ca fait deux ans que j'ai gradué de Dépôt. On m'a demandé mon opinion sur ce qui m'encourageait à rester au sein de la GRC. La première raison qui m'est venue à l'esprit était tout simplement que j'adorais mon travail.
En y réfléchissant davantage, je suis parvenu à la conclusion qu'ils y avaient trois raisons principales qui me faisait rester : le milieu de travail, la formation et l'horaire de travail.
Premièrement, le milieu de travail. J'ai toujours pensé que si on n'aime pas son travail, il est difficile d'être motivé. C'est pour cela que le milleu de travail est très important pour moi.
Depuis le début de ma carrière à la GRC il y a deux ans déjà, je suis affecté à Grande Prairie, en Alberta : une ville située à 4 000 kilomètres de ma famille. Mais je ne changerais pas mon équipe de travail pour rien au monde.
Je pourrais vous parler des heures de mes coéquipiers ou de mes superviseurs qui sont tout à fait formidables. J'ai une très bonne relation avec mes collègues et je les considère pour la plupart comme des amis. Ce qui est pour moi une très bonne chose parce que je suis très éloigné de ma famille. Mon équipe est une deuxième famille. Je dirais que les personnes avec qui je travaille sont en partie responsables de l'appréciation que j'ai pour mon travail.
Deuxièmement, la formation offerte par l'organisation est très importante. J'ai la chance de travailler dans un détachement qui a beaucoup d'occasions de formation. Ce que j'apprécie vraiment parce que grâce à la formation, je peux développer de nouvelles habiletés et perfectionner celles que je possède. Cela me rend meilleur dans mon travail et me procure plusieurs compétences qui me seront utiles tout au long de ma carrière.
Troisièmement, l'horaire de travaille est très important. En tant que policier, je travaille de jour et de nuit. Je suis sur une rotation de quatre jours de travail et quatre jours de congés. Ce qui est, à mon avis, fantastique. Je comprends que nous travaillons 12 h par jour sur cet horaire et que cela peut faire de longues journées, mais une fois que j'ai fini mon quart de travail, j'ai quatre jours de congés qui me permettent de relaxer, de faire des activités, etc.
Pour terminer, je dirais que la meilleure façon de garder ses employés est d'être à l'écoute de leur besoins.
Une personne qui n'est pas heureuse à son travail va partir tôt ou tard. Une personne qui n'a pas la possibilité de s'améliorer, d'apprendre de nouvelles choses ou d'avancer va se sentir inutile. Une personne qui n'est pas capable d'avoir de vie personnelle ou bien de concilier travail et famille ne restera pas. C'est pourquoi je crois que mes trois raisons sont importantes pour garder les employés.
Pour m'a part, je dois avouer que je suis chanceux parce que je n'ai aucun problème sur ces plans.
Julie Gallant
Il suffit d'une petite recherche dans Google pour qu'un employeur à la recherche de moyens de fidélisation trouve une foule de conseils, notamment sur les politiques de conciliation travail-vie privée, les régimes de rémunération concurrentiels, les plans de carrière et les programmes de mentorat. Parmi les nombreuses idées qui vaudraient la peine d'être explorées, deux se démarquent : en général, les employés qui sont fiers de leur milieu de travail et qui ont un fort sentiment d'appartenance à leur organisation tendent à y rester plus longtemps.
Ces notions peuvent sembler floues et difficiles à traduire en réalité. On peut toutefois poser des gestes très concrets et mesurables pour se rapprocher de ces objectifs à peu de frais.
Par exemple, les organisations qui veulent fidéliser leur effectif doivent d'abord chercher à attirer les employés qui leur conviennent.
En plus de s'assurer que les postulants ont les connaissances et les compétences voulues, les employeurs doivent s'efforcer de faire connaître la culture et les valeurs fondamentales de leur organisation au cours du processus de recrutement. Ainsi, l'employeur et le postulant peuvent évaluer leur compatibilité de façon éclairée.
La communication est essentielle au maintien de l'effectif. Pour être fiers de leur travail, les employés doivent savoir comment il contribue à la mission, à la vision et au mandat de l'organisation. Les dirigeants de tous les niveaux doivent pouvoir expliquer au personnel l'utilité de son travail et le lien qu'il présente avec la vocation de l'organisation. Ces discussions doivent à tout le moins faire partie du cycle organisationnel de gestion du rendement.
Les gestionnaires contribuent de façon vitale à la fidélisation et au sentiment d'appartenance.
Premièrement, un encadrement constant de la part du superviseur aide les employés à se sentir impliqués et valorisés. La rétroaction doit se donner régulièrement et de manière à favoriser un dialogue sur les éléments nécessaires pour atteindre le rendement désiré et les objectifs.
Les gestionnaires doivent donc avoir le soutien des cadres pour faire de la gestion continue du rendement une priorité au même titre que les objectifs opérationnels.
Deuxièmement, les gestionnaires qui apprennent à connaître leurs employés et qui font l'effort de bâtir une relation avec leur équipe créent une atmosphère où les gens ont un sentiment d'appartenance et d'utilité. La confiance et le respect sont essentiels dans tout milieu de travail, et c'est au gestionnaire de donner le ton au sein de son équipe.
Toutes ces activités devraient faire partie des pratiques de travail normales d'une orga-nisation. Ce sont des principes simples, mais cruciaux pour la fidélisation. L'établissement de mesures concrètes faisant l'objet d'un suivi régulier peut aider l'employeur à ne pas perdre de vue ces principes sous l'effet des contraintes opérationnelles.
La fidélisation est un travail sans fin, mais en jetant correctement les bases nécessaires, on peut certainement favoriser le succès.