Le s.é.m. Carl Sesely doutait de l'efficacité du géoprofilage jusqu'au jour où il a trouvé celui qui a mis le feu à 28 maisons habitées de Burnaby (C.B.) il y a plus de 20 ans.
Utile à la résolution de crimes en série, le géoprofilage analyse les lieux de ces crimes pour définir la zone de résidence probable du suspect et limiter le rayon de recherche.
« Contrairement à ce que nous montre les téléséries, le profilage géographique ne résout pas les crimes. C'est un outil d'enquête parmi d'autres », précise le s.é.-m. Sesely, qui était enquêteur au Dét. de Burnaby à l'époque des incendies.
Neuf mois après les faits, la police n'avait toujours pas de suspect, et la peur grandissait chez les citoyens. Pour faire avancer l'enquête, le s.é.-m. Sesely a demandé au Groupe des sciences du comportement d'élaborer un profil qui décrivait certaines des caractéristiques de l'auteur.
Il s'est également tourné vers le service de police de Vancouver pour obtenir un profil géographique, car la GRC n'en produisait pas à l'époque. Le rapport qu'il a reçu comprenait une carte en couleur des lieux du crime. Un cercle rouge marquait la zone de résidence probable du suspect.
Toujours sceptique, le s.é.-m. Sesely a présenté le graphique lors d'une consultation publique, où il a reçu un indice précieux d'une propriétaire d'immeuble dans le rayon de recherche. Celleci a indiqué que l'un de ses locataires correspondait à la description du suspect.
Après vérification de ses antécédents, le suspect a été arrêté.
Impressionné par l'exactitude du rapport, le s.é.-m. Sesely a décidé d'en apprendre davantage sur la technique. En 2001, il est devenu profileur géographique accrédité.
Il existe au Canada 12 profileurs géographiques : sept à la GRC, deux à la Sûreté du Québec et trois à la Police provinciale de l'Ontario. La plupart d'entre eux sont également profileurs criminels accrédités.
Des indices qui trahissent
Le s.é.-m. Sesely, qui compte 33 ans de service à la GRC, explique que chaque crime comporte un élément géographique qui donne des indices sur son auteur.
« Nous cherchons tout élément qui pourrait nous aider à comprendre le choix du lieu, comment l'auteur s'y est rendu et comment il a pris la fuite », ajoutet-il.
Les policiers peuvent établir un profil géographique pour les crimes en série qui se caractérisent par des gestes répétés commis par la même personne dans au moins cinq lieux répartis dans une zone, par opposition à ceux commis dans la même rue.
« Il est important d'étudier la géographie, car les habitudes de chasse des criminels sont souvent prévisibles, de dire le s.é.-m. Sesely. Ils peuvent les changer momentanément pour nous semer, mais finissent par se lasser et retomber dans leurs vieilles habitudes. »
Les policiers insèrent le lieu de chaque crime pertinent dans un logiciel qui analyse la zone où les crimes ont été commis ou, comme on l'appelle dans le jargon policier, le terrain de chasse.
« Le logiciel examine chaque pixel de la carte et s'interroge sur la probabilité que ce soit la zone de résidence du criminel, explique le s.é.-m. Sesely. Il répète la même opération 40 000 fois avant de produire un pourcentage de probabilités. »
Si les éléments d'un crime ne répondent pas aux critères d'établissement d'un profil géographique, les profileurs peuvent toujours analyser la géographie du lieu, en personne ou à l'aide d'images satellite et de vues panoramiques sur les rues.
Habitudes de chasse
En 2013, le serg. Jean-Yves McCann de la Sûreté du Québec – nouveau profileur géographique – travaillait sur son premier dossier à Saint-Jean-sur-Richelieu (Qc), où une personne mettait le feu à des barbecues, à des panneaux et à des haies de cèdre.
Formé par le s.é-m. Sesely, le serg. McCann lui a demandé son aide pour établir un profil de ces incendies en série qui étaient de plus en plus graves.
Après une longue enquête sur chaque lieu de crime, ils ont établi un profil et indiqué aux enquêteurs où ils devaient concentrer leur recherche. Sur cette recommandation, des policiers ont afflué à pied dans la zone ciblée et pris le pyromane en flagrant délit.
« Son adresse se situait en plein dans la zone visée, affirme le serg. McCann. C'était un exemple type de notre utilisation du géoprofilage pour cibler des suspects et aider les policiers à arrêter le coupable. »