Lorsqu'il a perdu l'usage d'un œil après qu'on lui a retiré une tumeur sur le nerf optique en 2013, le gend. Michael Jaszczyszyn s'est fait dire qu'il ne pourrait jamais reprendre des fonctions actives. Mais il n'allait pas laisser une politique sceller son sort. En près de trois ans, il a établi un précédent qui a changé la façon dont la GRC évalue ses normes en matière de vision.
Le gend. Jaszczyszyn a perdu un sixième de sa vision périphérique et au début, il avait du mal à percevoir la profondeur. En 2014, il a repris le travail dans un nouveau poste que la GRC lui avait offert en vertu de son obligation de prendre des mesures d'adaptation pour les personnes handicapées.
« J'adore mon métier et je ne pouvais pas me résoudre à passer le reste de ma carrière dans un bureau », dit-il.
Il a suivi tous les cours de recertification standard de la GRC et plusieurs autres formations policières, la plupart au niveau d'instructeur et pour lesquelles il a obtenu les meilleures notes.
Afin d'améliorer sa perception de la profondeur, détectée par les yeux sur un mètre environ, il a choisi stratégiquement des disciplines axées sur des aptitudes à distances rapprochées comme le tir de précision, le maniement des armes à feu, le menottage et la prise à bras le corps.
Il affirme que les cours ont aidé son œil à s'adapter à sa perte de vision, si bien que cette dernière ne l'empêche plus de faire son travail de policier. Il a un certificat médical qui le prouve.
Des exceptions à la règle
Or, comme il est énoncé dans le Manuel des services de santé de la GRC, le profil médical d'un policier ayant une vision monoculaire (d'un seul œil) l'empêche d'être pleinement opérationnel. À l'époque, le processus d'évaluation ne prévoyait aucune exception.
Mais le gend. Jaszczyszyn allait prouver qu'il était l'exception. Dans une réfutation du requérant, il a fait valoir que la justification de la GRC était désuète et indûment discriminatoire, et qu'on doit évaluer chaque dossier individuellement plutôt que d'appliquer la même règle
à tous.
« On n'a pas pu prouver que toutes les personnes ayant une vision monoculaire étaient incapables d'assumer des fonctions actives, explique-t-il. Certains arrivent à s'adapter de manière à ce que leurs limites ne nuisent pas à leur travail, et j'ai pu prouver que j'étais une de ces personnes. »
« Nous n'avions jamais vu un tel cas auparavant », soutient la Dre Josée Pilon, conseillère médicale nationale de la GRC. Son équipe a consacré une année à l'examen des normes de la GRC en matière de vision monoculaire. « Comme ce n'est pas une pratique acceptée dans bien des organisations policières, au Canada et à l'étranger, de vastes consultations ont été menées auprès d'experts et de scientifiques. »
En juin 2017, trois ans après être retourné au travail, le gend. Jaszczyszyn a enfin appris que ses arguments avaient été jugés fondés et qu'il était autorisé à reprendre des fonctions actives.
« Nous avons revu nos normes professionnelles et nos pratiques en fonction des recherches scientifiques les plus récentes », poursuit la Dre Pilon.
Si les normes sur l'acuité visuelle n'ont pas changé, une exception concernant la vision monoculaire y a été ajoutée. Dorénavant, les cas sont évalués individuellement et on tient compte des causes sous-jacentes du handicap, de l'adaptation et des fonctions visuelles restantes.
« Un diagnostic ne définit pas une personne. Il faut aussi évaluer ses aptitudes, conclut la Dre Pilon. Certains reprogramment leur cerveau pour qu'il se serve d'autres indices visuels et développe des aptitudes, comme des mouvements de tête subtils permettant à l'œil de compenser la perte de vision. »
Une deuxième chance
Aujourd'hui, le gend. Jaszczyszyn travaille aux services généraux de Stony Plain, l'un des détachements les plus occupés de l'Alberta. Quelques autres policiers comme lui ont aussi repris des fonctions actives depuis que la politique a été modifiée.
Selon Tamara Morriss, directrice intérimaire du Programme de gestion de l'incapacité et des mesures d'adaptation, lorsqu'un policier est frappé d'une incapacité physique ou mentale de façon temporaire ou permanente, la GRC a pour priorité de le soutenir et de le garder à son emploi.
Si un policier ne peut pas continuer de remplir ses fonctions en raison d'une maladie, d'une blessure ou d'un handicap, la GRC cherchera un autre poste qui correspond à ses compétences et à son expérience. Il se peut toutefois qu'il doive déménager dans une autre ville ou province.