Vol. 80, Nº 2Reportages

Un policier parlant à un groupe de jeunes dans un terrain de stationnement.

L’heure juste auprès des jeunes

Prévention de la violence des gangs à Surrey

L'Équipe de lutte contre les gangs de Surrey (ELGS) présente le programme Shattering the Image, qui vise à dissiper auprès des jeunes les mythes de la vie dans un gang. Crédit : GRC à Surrey

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Pour mettre fin à la violence des gangs à Surrey (C.-B.), le plus grand détachement de la GRC consacre plus de temps que jamais dans les écoles primaires et intermédiaires dans une vaste campagne de prévention et d'intervention.

« Il s'agit toujours de prévenir l'implication des jeunes dans le crime, la violence et les gangs, explique le serg. Neil Kennedy, responsable du Groupe pour les jeunes de la GRC à Surrey. Pour mettre toutes les chances de notre côté, nous devons intervenir de façon précoce. Les années précédant le secondaire sont critiques. »

Le Groupe pour les jeunes a vu ses effectifs croître de 20 p. 100 en trois ans et s'adresse à un segment plus jeune, à partir de la 4e année. Grâce aux programmes Wraparound, Shattering the Image et Game On, la police encourage les jeunes à faire des choix de vie sains qui les éloignent du monde des gangs.

« Ces programmes nous permettent de joindre les jeunes et de les orienter vers des choix de vie constructifs, ajoute le serg. Kennedy. Les jeunes apprennent à établir des relations positives et à adopter des comportements sains. »

Programme Shattering the Image

Dans l'année écoulée, le Groupe pour les jeunes et l'Équipe de lutte contre les gangs de Surrey (ELGS) ont collaboré étroitement avec le district scolaire pour mobiliser les jeunes de 8 à 13 ans avant qu'ils ne prennent la mauvaise voie.

« Pourquoi attendre qu'ils aient 14 ou 15 ans quand nous pouvons aller en amont et soutenir les enfants à l'âge de 8 ou 9 ans, précise Rob Rai, directeur des relations communautaires et avec les écoles au district scolaire de Surrey. La prévention n'a pas d'aura prestigieuse, mais elle est bien plus efficace. »

Sur le plan de la violence des gangs, le serg. Michael Sanchez de l'ELGS a constaté la prévalence de nombreux mythes chez les jeunes, comme celui que les gangs procurent richesse et puissance; les dimensions de violence et de crime sont souvent minimisées.

« Il fallait trouver le moyen d'empêcher la prochaine génération d'entrer dans les gangs, dit il. Nous devions briser le mythe d'une vie prestigieuse et donner l'heure juste sur les gangs. »

Avec le soutien du district scolaire, il a fait équipe avec Jordan Buna, ancien membre d'un gang devenu défenseur des jeunes, pour créer le programme Shattering the Image, un exposé de sensibilisation au danger des gangs pour les écoles primaires, intermédiaires et secondaires.

Adapté d'un programme provincial, End Gang Life, créé par l'Unité mixte d'enquête sur le crime organisé (UMECO) de la C.-B., Shattering the Image vise l'univers des gangs propre à Surrey.

« Notre message est taillé sur mesure, souligne le serg. Sanchez. Des enfants de plus en plus jeunes sont ciblés et recrutés par les gangs. »

Remettre les pendules à l'heure

Selon le serg. Sanchez, des enfants d'à peine 12 ans sont recrutés. Bon nombre sont exposés à l'image des gangs dans les médias sociaux, dont Facebook et Snapchat. Il n'est pas rare de voir des jeunes publier des photos avec des flacons de vodka, des pistolets à air comprimé et des sachets de marihuana, qui banalisent le comportement de gang chez les jeunes de la 5e et de la 6e.

Le programme Shattering the Image explique aux jeunes pourquoi ces comportements sont risqués et les incite à faire preuve de discernement dans les médias sociaux. Il aborde également l'histoire des gangs dans le Lower Mainland, les gangs actuels à Surrey, les dernières tactiques de recrutement et les tendances dans la rue.

Le serg. Sanchez suit l'évolution des tendances sur le terrain et parle de son expérience de policier dans sa présentation.

« Dernièrement, nous avions de la difficulté à repérer les drogues dans les fouilles de véhicule, relate-t-il. Une enquête a révélé que les nouvelles recrues les dissimulaient dans leur cavité anale. La tactique, si elle n'est pas nouvelle, se répand de plus en plus à Surrey, alors j'en parle dans mon exposé. »

Le dernier segment du programme est le récit bouleversant de Jordan Buna, qui a été impliqué dans le crime et les gangs à l'adolescence à Surrey.

« Je fais part de mon expérience personnelle et montre l'importance des choix qu'on fait, dit-il. Les jeunes ne sont pas conscients des répercussions de leurs décisions; je leur en donne donc un exemple concret. »

M. Buna se décrit comme le fils d'une bonne famille biparentale qui a frayé avec des gens peu recommandables en 5e et en 6e. Dans la vingtaine, il a trempé dans le trafic de drogues et a été arrêté pour trafic de drogues et port d'armes. Après avoir fait de la prison, il s'est repris en main en obtenant un diplôme en psychologie et en criminologie. Depuis, il sillonne la province pour relater son histoire personnelle dans le cadre des programmes End Gang Life de l'UMECO et Shattering the Image.

« C'est ce que nous voulions faire à Surrey, car ici les jeunes parlent déjà de drogues et de gangs, explique M. Buna. Je veux aborder le sujet dès la 7e année pour dissiper les mythes véhiculés dans les médias sociaux et par les camarades de classe. »

Depuis le début du programme en septembre dernier, la demande à l'égard des exposés s'est décuplée. On a donc affecté deux membres de plus à l'ELGS pour y répondre.

Le droit chemin

Mentorat : un exemple de réussite

Par le serg. Neil Kennedy, Groupe pour les jeunes de la GRC à Surrey

Le premier jeune que j'ai pris sous mon aile était en 7e année. Très timide, il n'avait pas une haute estime de soi et ne prenait pas soin de lui même. En l'entourant de pensées positives, je l'ai aidé à sortir de sa coquille : c'est vite devenu l'un des jeunes les mieux habillés à l'école.

Il n'était pas très bâti, mais à la fin de l'année, lorsqu'il redressait ses quatre pieds cinq, il semblait faire six pieds : plein d'assurance, engageant et toujours prêt à rendre service. Selon sa mère, mon mentorat a fait des merveilles auprès de lui.

Il est maintenant en 9e et je lui rends visite de temps à autre. Il a un bon groupe d'amis et voit désormais l'école comme une bonne chose. Ce qui me réjouit le plus, c'est de soutenir des jeunes en difficulté et leur donner de véritables chances de réussir.

Une autre initiative de prévention du crime chez les jeunes à Surrey est le programme Wrap. Conçu de concert avec le district scolaire, il cherche à dissuader les jeunes à risque d'adhérer au mode de vie de la drogue et des gangs en les entourant d'un éventail de ressources communautaires. L'initiative est devenue si populaire qu'il y a maintenant une liste d'attente.

« Nous ne voulions pas que les jeunes sur la liste d'attente soient laissés à eux-mêmes, se rappelle le serg. Kennedy. Il nous fallait empêcher les facteurs de risque – comme les relations malsaines, l'activité criminelle, l'absentéisme scolaire, la toxicomanie et les troubles de santé mentale – d'établir leur emprise. Il s'agit de forts incitatifs à rallier le monde du crime. »

C'est pourquoi le Groupe pour les jeunes a coopéré avec les Grands Frères et le district scolaire pour créer Game On – un programme de mentorat de 12 semaines visant les jeunes manifestant les signes d'un comportement lié aux gangs. L'initiative permet de mettre les jeunes en contact avec des leaders modèles et des mentors qui les ramèneront dans le droit chemin, avant qu'une intervention plus musclée ne devienne nécessaire.

La clé consiste à exposer les jeunes à des modèles positifs, car dès la 8e et la 9e année, la plupart ont déjà établi leurs valeurs sociales et morales, et leurs relations. En allant au-devant des jeunes plus tôt, on peut avoir une influence bénéfique sur leurs décisions futures.

« Le programme remplace les comportements négatifs qui suscitent une réaction néfaste, selon le serg. Kennedy. Une fois mobilisés, les jeunes comprennent qu'ils ont amorcé le virage et ont leur vie en main. »

Les programmes Shattering the Image, Wrap et Game On reposent sur la volonté de créer des liens solides et positifs entre les jeunes et la police. Qu'il s'agisse de parler aux jeunes des réalités de la vie dans les gangs ou de mobiliser ceux qui trempent déjà dans la criminalité, la police a un rôle déterminant à jouer dans la prévention du crime à Surrey et ailleurs.

« Ces jeunes cherchent ardemment à s'attacher à quelque chose ou à quelqu'un symbolisant la réussite, la puissance et le prestige, précise le serg. Sanchez. Quand nous effectuons un rapprochement et leur parlons des choix qu'ils font, ils diront souhaiter devenir policiers. Et c'est le fruit de ce rapprochement que nous avons opéré avec eux. »

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