Dans bien des cas, les policiers sont mainte-nant les premiers intervenants dépêchés auprès de personnes souffrant de maladie mentale ou de dépendance, mais la formation qu'ils reçoivent à cet égard ne suffit pas.
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Le Service de police d'Edmonton (SPE) a donc fait équipe avec l'Université de l'Alberta pour se pencher sur une nouvelle façon d'améliorer l'issue de ces interactions. L'étude sur la question, menée par Peter Silverstone (Ph. D.) et l'étudiante au doctorat Yasmeen Krameddine, a jusqu'ici donné des résultats très positifs.
La formation découlant de l'étude vise à améliorer les contacts entre le policier et les personnes qui manifestent des signes de maladie mentale. Ce qui en fait l'originalité, c'est qu'elle fait participer des acteurs à des simulations réalistes qui sont le fruit d'une étroite collaboration entre la police et l'Université de l'Alberta.
Au cours de ces simulations, les acteurs interagissent avec des policiers pour les aider à améliorer leurs compétences en communication verbale et non verbale, leurs techniques de désescalade, leur empathie et leurs connaissances en matière de santé mentale.
La formation intensive d'un jour s'articule autour de simulations sur la dépression, la dépendance, la schizophrénie, le sevrage alcoolique, la manie et les personnes suicidaires.
Elle permet aux policiers d'améliorer leurs réactions à des situations réelles et de recevoir des commentaires non seulement des acteurs professionnels qui y participent, mais aussi d'agents formateurs plus expérimentés qu'eux.
Les acteurs apprennent à souligner les aspects tant positifs que négatifs de la simulation et à expliquer en détail comment le comportement de chaque policier les a fait sentir. C'est essentiel pour aider le policier à comprendre l'effet de ses interventions sur les émotions et le comportement des personnes avec lesquelles il entre en contact.
Pour avoir reçu une formation exhaustive sur la communication verbale et non verbale, les acteurs savent adapter leurs interactions aux propos ou aux actions du policier.
Par exemple, si le policier roule les yeux, n'écoute pas ou tente de s'emparer de l'acteur, ce dernier se montre plus agressif et moins collaborateur.
Si, en revanche, le policier semble porter attention à l'acteur et le regarde dans les yeux, ce dernier se détend, adopte une attitude de collaboration et fournit toute l'information demandée.
La rétroaction faisant suite à chaque simulation met l'accent sur les manifestations d'empathie et le langage corporel.
Après chaque simulation, l'acteur explique pourquoi il a agi de telle ou telle façon, ce qui permet au policier de mieux comprendre comment une autre personne peut percevoir ses actions, ses paroles et son langage corporel.
Un acteur peut par exemple lui dire : « quand tu m'as demandé mon nom, j'ai senti que tu t'intéressais à moi en tant que personne, alors j'étais à l'aise de répondre à tes questions » ou « quand tu m'as dit de me calmer, ça m'a fâché parce que le ton que tu employais me disait que tu te fichais des raisons de ma colère ».
Jusqu'à maintenant, plus de 650 poli-ciers ont suivi cette formation. Les résultats sont très positifs.
Sur une période de six mois, les superviseurs des membres du SPE ont observé une nette amélioration de leurs techniques de communication, de manifestation d'empathie et de désescalade.
De plus, les policiers arrivent mieux à reconnaître une personne en détresse, à intervenir auprès d'elle et à communiquer de manière empathique avec elle en toute confiance.
Les appels classifiés comme relevant du domaine de la santé mentale ont par conséquent grimpé de 41 pour cent, mais le temps consacré à chacun a baissé de 19 pour cent, ce qui a mené à des économies de 83 828 $ sur six mois.
Les policiers ont par ailleurs affirmé avoir beaucoup plus confiance en leur formation et en leur capacité à interagir avec une personne atteinte de maladie mentale. On a aussi constaté une diminution considérable (supérieure à 40 pour cent) de toute forme de recours à la force lors des interventions auprès de telles personnes. D'autres initiatives policières internes peuvent cependant avoir contribué à cette baisse.
Voilà des résultats prometteurs qui montrent les effets positifs de cette initiative novatrice de formation en santé mentale.
Ce qui ressort de l'étude et des conseils donnés aux policiers, c'est que les petits gestes peuvent faire une grande différence.
L'écoute active et les manifestations d'empathie tant verbales que non verbales améliorent les résultats qu'obtiennent les policiers, surtout lorsqu'ils ont affaire à une personne souffrant d'un problème mental ou d'une dépendance.
L'étude révèle aussi que ces techniques peuvent s'enseigner et s'améliorer. La formation qui en a résulté est fidèle à la réalité et applicable sur le terrain. Il ressort nettement des commentaires des policiers participants que les simulations sont réalistes et qu'ils ont été en mesure d'appliquer au quotidien les techniques ainsi apprises.
Conseils pour composer avec une personne souffrant d'un problème psychiatrique
Essayez de faire ce qui suit :
- Sur le ton de la conversation, demander le nom de la personne et lui dire le vôtre. Ce petit effort de dialogue peut grandement favoriser la compréhension et l'empathie.
- Faire preuve d'écoute active. Gardez votre attention sur la personne et regardez-la dans les yeux. Vous pouvez aussi résumer ce qu'elle vous dit. Hochez la tête de haut en bas pour montrer clairement que vous comprenez. En faisant preuve d'écoute active, vous renforcerez votre lien d'empathie avec le sujet, ce qui vous aidera à obtenir l'information qu'il vous faut.
- Utiliser un langage corporel dénotant l'ouverture. Le langage corporel, forme de communication inconsciente, peut aggraver ou désamorcer une situation. Gardez une posture décontractée, évitez de croiser les bras, souriez et montrez que vous vous souciez du sujet pour l'aider à se sentir en sécurité et en confiance.
- Utiliser la technique du miroir. Copiez le langage corporel du sujet si possible. C'est un puissant signe non verbal d'empathie.
- Nommer et confirmer les sentiments du sujet. Les émotions sont à l'origine de bien des problèmes. En les nommant, vous montrez que vous écoutez. Par exemple : « Vous avez l'impression qu'on ne vous reconnaît pas à votre juste valeur? » Offrir une confirmation aide aussi la personne à voir que ses sentiments sont normaux. Par exemple : « N'importe qui serait triste de perdre son emploi. »
- Mettre l'accent sur la famille. En posant des questions sur les proches de la personne, vous pouvez réduire son isolement et lui rappeler qu'il y a des gens dans sa vie. Par exemple : « avez-vous des enfants? » ou « que feraient vos enfants sans vous? »
- Expliquer ce que vous faites et pourquoi. La recherche montre que cela réduit les risques d'agressivité et d'escalade. Par exemple : « Je vais devoir vous arrêter parce que cinq mandats ont été lancés à votre égard. »
Essayez de ne pas faire ce qui suit :
- Dire à la personne de se calmer ou de se détendre. Cela risque plutôt de provoquer sa colère en lui faisant sentir que vous faites preuve de condescendance à son égard ou que vous essayez de lui dire quoi faire.
- Utiliser un langage corporel qui exprime la dominance. Si vous vous plantez debout en position de hauteur par rapport au sujet, mains à la taille ou sur votre arme, vous dégagerez une attitude autoritaire qui peut le mettre sur la défensive et le faire sentir impuissant et insignifiant. Il sera alors moins porté à collaborer. S'il est assis, essayez plutôt de vous accroupir pour lui parler d'égal à égal.
- Imiter à tort la personne. La technique du miroir ne convient pas toujours. Si le sujet crie, ne faites pas comme lui, peu importe la provocation. Parlez-lui plutôt d'une voix douce afin de l'obliger à arrêter pour vous entendre. S'il est effrayé ou anxieux, le fait d'adopter son langage corporel peut exacerber ses sentiments et aggraver la situation. Gardez une apparence calme, même si le sujet est agité. Dans bien des cas, il se mettra tôt ou tard à suivre votre exemple.
- Nier la légitimité de ses sentiments. Toutes les émotions sont réelles, aussi déraisonnables qu'elles puissent paraître. Ne ridiculisez pas la situation que vit la personne. Par exemple, si elle entend des voix, ne la contredisez pas. Demandez-lui plutôt depuis combien de temps elle les entend ou comment elles la font sentir.