Vol. 76, Nº 4Avis d'un expert

Incendies criminels

Un outil pour aider les experts à les élucider plus rapidement

Mark Sandercock a toujours cherché un moyen d'accélérer la résolution des cas d'incendies criminels. Sa solution? Un outil capable d'analyser les débris en quelques secondes. Crédit : Richard Siemens, Université de l'Alberta

L'incendie volontaire est l'un des crimes les plus difficiles à élucider, la preuve matérielle étant détruite instantanément. Mark Sandercock, Ph.D., expert en analyse de traces aux Laboratoires judiciaires de la GRC à Edmonton, et James Harynuk, professeur de chimie à l'Université de l'Alberta, ont créé un programme informatique capable d'analyser les débris d'incendie. M. Sandercock nous livre, sous la plume de Deidre Seiden, les avantages de cet outil.

À l'heure actuelle, comment analyse-t-on les débris?

Lorsqu'un enquêteur croit qu'il s'agit d'un incendie suspect, il prélève des échantillons – généralement des fragments calcinés, souvent méconnaissables, de meubles ou de revêtement de sol – sur le foyer supposé de ce dernier. Au laboratoire, nous en extrayons les substances volatiles et les examinons pour détecter des fluides inflammables comme l'essence. Or, en même temps, nous dégageons les produits de la combustion des objets se trouvant sur les lieux. C'est dire que nous cherchons une aiguille dans une botte de foin.

Par la suite, deux experts sont chargés de l'étude du dossier dans le cadre de ce que nous appelons « examen par les pairs ». L'un exami-ne les résultats de l'analyse des débris et rédige ses constatations; l'autre revoit le travail du premier. Si leurs conclusions concordent, un rapport est préparé, puis remis à l'enquêteur.

S'agit-il d'un processus de longue haleine?

Pour un échantillon simple, l'analyse peut prendre environ une heure. Mais pour certains échantillons complexes, l'interprétation des données seule peut prendre plusieurs heures, voire une journée entière. Si on confie l'étude des données de chaque échantillon à deux personnes, nos experts peuvent consacrer beaucoup de temps à l'analyse.

Est-ce le motif de votre collaboration avec l'Université de l'Alberta?

Oui. Nous avons travaillé avec l'établissement pour créer un programme informatique capable d'examiner rapidement des données et de confirmer la présence d'essence. Si nous parvenons à intégrer ce modèle dans notre laboratoire, nous éliminerons la nécessité d'un deuxième examen et gagnerons du temps, puisque la machine peut analyser les données obtenues d'un seul échantillon en 10 secondes.

Comment en êtes-vous venu à participer au projet?

Responsable technique du programme, je reste à l'affût de ce qui nous aiderait à améliorer notre travail. Donc, quand James m'a téléphoné à propos de sujets de recherche, nous avons commencé à envisager diverses possibilités. L'idée du programme informatique l'a tellement intéressé qu'il s'en est emparé. L'Université s'est chargée de la conception pendant que j'ai eu le privilège de la conseiller pour m'assurer qu'elle reste dans la bonne voie.

Quel intérêt pour les enquêteurs?

Primo, nous ne retiendrons plus les dossiers longtemps, et les enquêteurs recevront les résultats plus vite; secundo, les spécialistes seront libres pour attaquer d'autres dossiers.

Avez-vous utilisé le programme?

Pas encore. Mais nous l'avons soumis à un essai : nous avons remis à l'Université les données d'analyse de plusieurs centaines d'échantillons. Elle a fait analyser ces données par le programme et a obtenu les mêmes résultats que nous. Le programme a indiqué la présence d'essence dans les échantillons qui en contenaient, mais pas dans ceux qui n'en contenaient pas. C'était là la preuve de son efficacité.

Avant de pouvoir l'utiliser dans notre labo, il faut que l'Université crée une interface conviviale pour nous aider à exécuter le programme et qu'elle diversifie sa base de données des liquides inflammables. J'ose espérer que nous pourrons l'essayer dans deux ou trois ans.

Date de modification :