Lorsque le Canada affecte des policiers à la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), ceux-ci deviennent des membres de la police civile des Nations Unies (UNPOL). Ensuite, les Nations Unies déterminent l'usage optimal de leurs ressources.
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C'est ainsi que fonctionnait la mission depuis ses débuts en 2004. Mais après le tremblement de terre en 2010, les choses ont changé.
Lorsque la communauté internationale a su la violence sexuelle ou fondée sur le sexe (VSFS) dont étaient victimes les femmes et les enfants dans les villages de tentes (où près d'un million de personnes vivaient après le tremblement de terre), il a fallu s'y attaquer.
« Les crimes sexuels étaient considérés comme des infractions mineures : il fallait changer cette mentalité », se souvient l'ancien commissaire de police de la MINUSTAH Marc Tardiff.
Une idée nouvelle
La VSFS est devenue un élément central de la mission. Lorsque la Norvège a suggéré à l'ONU en 2010 de créer une équipe spécialisée en la matière, Marc Tardiff n'était pas convaincu.
Il devait affecter les ressources là où, selon lui, on en avait besoin. La Norvège, qui était prête à financer le projet, voulait en avoir le contrôle et tenait à la continuité.
« Mais après six, neuf mois, j'ai conclu que c'était la meilleure façon de faire », poursuit Marc Tardiff.
Au cours de la première phase du projet, l'équipe spécialisée en VSFS a donné de la formation à environ 1 000 membres de la Police nationale d'Haïti (PNH) de toutes les régions d'Haïti sur le traitement des affaires de violence conjugale et d'agression sexuelle. Elle a également formé des formateurs de la PNH pour qu'ils puissent s'approprier le projet quand ils seraient prêts.
Par ailleurs, elle a fourni un soutien logistique pour l'aménagement, dans les postes de police, d'installations où les victimes de VSFS puissent se sentir à l'aise de porter plainte.
Deux membres canadiens de l'UNPOL font partie de l'équipe depuis le début. Dans le cadre des négociations relatives à la deuxième phase du projet, qui sont en cours, les Norvégiens ont ajouté une clause spéciale pour s'assurer que des Canadiens continuent de faire partie de l'équipe.
L'équipe travaille maintenant à plusieurs projets, dont une toute nouvelle initiative dans le cadre de laquelle la PNH a installé pendant deux semaines une clinique dans un hôpital de la région de Cap-Haïtien.
« Souvent, les victimes vont voir leur médecin, mais n'ont aucun moyen de transport ou de communication pour porter plainte à la police », explique le serg. Alain Tremblay de la GRC, un membre de l'équipe spécialisée en VSFS. « Cette initiative permet aux victimes de parler à la police à l'hôpital. »
La touche canadienne
« Au moment de rendre compte des réalisations du Canada au cours de la dernière année dans le cadre de la mission, la GRC a remarqué que l'équipe de VSFS avait accompli des progrès substantiels et obtenu des résultats concrets à l'appui du renforcement des capacités de la PNH », explique le serg. Pierre Rivet, chargé de projet du Développement policier international à la GRC.
C'est que pour une rare fois, ce projet, dirigé par des Norvégiens et des Canadiens, a profité d'une continuité.
« Nous avons compris que les équipes spécialisées étaient la voie à suivre », poursuit le serg. Rivet.
Présentement, en plus de faire partie de l'équipe spécialisée en VSFS, le Canada collabore avec l'ONU à la mise sur pied d'un projet sur les crimes graves et le crime organisé, d'un autre sur la police communautaire et du Programme d'accompagnement des cadres policiers (PACP).
« Nous sommes là pour les accompagner, déclare le serg. Stéphane Bérubé de la GRC, qui participe au PACP. Nous tentons de les amener à penser de façon stratégique. Pas seulement à court terme, mais à long terme. »
Le PACP consiste à encadrer de futurs cadres intermédiaires afin qu'ils mettent ce qu'ils ont appris en pratique sur le terrain. Même si le programme n'en est qu'à ses balbutiements, le serg. Bérubé affirme que les choses vont rondement.
« Nous nous améliorons sans cesse, conclut-il. Nous profitons des idées nouvelles des policiers qui arrivent du Canada, mais dans un an, nous aurons toujours le même objectif, celui de renforcer la PNH en rendant ses cadres plus solides. »