Vol. 80, Nº 3Débat de spécialistes

Une policière aux commandes d'un bateau à moteur.

Conseils de sécurité pour randonneurs et plaisanciers

Pour la cap. Christina Wilkins, la sensibilisation aux dangers, le port de l'équipement de sécurité et le respect des bonnes pratiques de navigation sont essentiels. Crédit : Photo fournie par la cap. Christina Wilkins

La plupart des Canadiens savent quoi faire lorsqu'ils prennent le volant : boucler sa ceinture, conduire avec toutes ses facultés et regarder la route. Mais ils oublient parfois ces sages consignes lorsqu'ils conduisent des véhicules récréatifs. Six policiers de la GRC nous disent ce qu'il faut faire – sensibilisation, formation ou répression – pour garantir une utilisation sécuritaire des véhicules tout-terrain, des embarcations et des motoneiges.

Les experts

  • Cap. Christina Wilkins, Services de police rurale améliorés, comté de Grande-Prairie (Alb.)
  • S.é.-m. Stephen MacQueen, district du comté de Lunenburg (N.-É.)
  • Insp. Alexandre Laporte, Détachement de Yellowknife (T.N.-O.)
  • Cap. Sheldon Clouter, Détachement de Musquodoboit Harbour (N.-É.)
  • Cap. Janet LeBlanc, Services de la circulation-corridor Nord, Détachement d'Amherst (N.-É.)
  • Cap. Cam Long, Services cynophiles et coordonnateur divisionnaire de la recherche et du sauvetage, Yukon

Cap. Christina Wilkins

Les patrouilles sur les sentiers et les voies navigables occupent une grande partie de mes responsabilités en tant que chef des Services de police améliorés. Avec mon équipe et nos partenaires (Pêches et Océans et services de répression du comté), je sillonne souvent les coins reculés, pour réprimer les infractions certes, mais surtout rappeler les pratiques sécuritaires de conduite et de navigation.

Le gouvernement et d'autres organismes qui ont à cœur la sécurité prodiguent une multitude de conseils à ceux qui explorent l'arrière-pays dans des véhicules hors route (VHR) ou par bateau. La liste peut être très détaillée et je recommande d'être bien préparé. Mais du point de vue strictement policier, notre message reste simple : pas d'alcool en conduisant et portez un casque ou un gilet de sauvetage.

Lorsque je patrouille, j'observe que de nombreux conducteurs d'embarcations et leurs passagers (au moins 90 p. cent d'entre eux) ne portent pas de gilet de sauvetage ou de vêtement de flottaison individuel (VFI). Et il n'est pas rare que les occupants, y compris le conducteur, aient consommé de l'alcool. Or, la conduite en état d'ébriété est une infraction au Code criminel, tant sur les routes que sur les plans d'eau.

L'utilisation des gilets de sauvetage est aussi régie par les lois fédérales. Le conducteur de l'embarcation doit disposer d'au moins un VFI pour chaque occupant. Souvent, lorsqu'on effectue des contrôles de routine, le conducteur se presse d'exhiber le nombre réglementaire de gilets de sauvetage, mais ceux-ci sont rarement bien entretenus et ne sont pas destinés à quelqu'un en particulier; ils sont juste là pour montrer qu'on est en règle.

J'ai vu de mes yeux comment un bateau peut chavirer en quelques secondes. Dans ces cas-là, on n'a pas le temps de trouver le VFI adapté à sa taille et de l'attacher solidement. Si en plus les occupants ont consommé des psychotropes comme l'alcool, l'issue peut être fatale.

Même chose pour les casques de VHR. Les modèles quasi universels sont révolus. Sur des véhicules tout-terrain et des motoneiges qui peuvent rouler à plus de 80 km/h, un casque bien attaché et bien ajusté peut faire toute la différence en cas de collision.

Le meilleur moyen d'être en sécurité sur les sentiers et les voies navigables, c'est d'avoir conscience du danger, de porter l'équipement de protection et de respecter les pratiques de conduite sécuritaires.

S.é.-m. Stephen MacQueen

La rive sud de la Nouvelle-Écosse attire les plaisanciers en raison de ses paysages pittoresques, de ses centaines d'îles et de la beauté de la nature. Plusieurs communautés en profitent en organisant des régates, des festivals et autres événements qui consti- tuent une manne pour les entreprises locales. Cependant, cette affluence n'est pas sans risque pour la sécurité publique.

En 2016, un rapport de la Société de sauvetage du Canada révélait que les pro-vinces des Maritimes affichaient un taux de noyade supérieur à la moyenne nationale. Entre 2009 et 2013, on a dénombré 138 morts par noyade dans ces provinces. Pour ce qui est des décès liés à la navigation, 80 p. cent des noyés ne portaient pas de VFI, 54 p. cent naviguaient après la tombée de la nuit et 35 p. cent avaient consommé de l'alcool.

Le district de la GRC dans le comté de Lunenburg a donc entrepris de sensibiliser les plaisanciers aux lois et règlements et de leur donner des conseils de sécurité généraux. En collaboration avec le Groupe des communications stratégiques de la GRC en Nouvelle-Écosse, le district a effectué une série de patrouilles maritimes couplée à la diffusion d'information par Twitter. Les médias avaient été avisés au préalable de l'initiative, notamment grâce à des entre-vues données par nos policiers.

Les échanges avec le public sur l'eau et dans les médias sociaux ont beaucoup contribué à faire passer le message de manière agréable et interactive. À la fin de la journée, on a fait le bilan des infractions les plus courantes relevées durant les patrouilles et des amendes qu'on aurait données en temps normal.

Je crois que la sensibilisation est le meilleur moyen de faire baisser le nombre d'infractions et, partant, de réduire les pertes de vie en mer. Viennent ensuite la visibilité policière et la répression et le district du comté de Lunenburg a pris l'engagement de mettre son patrouilleur à l'eau au moins trois fois par semaine de juin à septembre, justement pour ça.

Insp. Alexandre Laporte

La topographie particulière des Territoires du Nord-Ouest apporte son lot de défis en raison de l'accès facile aux lacs, rivières et régions isolées. L'hiver, les conditions sont difficiles et l'été, il fait jour pendant 24 heures.

Alors que nos régions isolées deviennent plus accessibles, le risque d'incidents liés aux activités extérieures croît. Dans les Territoires du Nord-Ouest, les campagnes de sensibilisation axées sur la survie et la préparation contribuent grandement à informer le public sur les dangers inhérents aux régions sauvages et les difficultés liées aux opérations de recherche et de sauvetage.

Notre visibilité continue d'être le meilleur moyen de dissuasion et de persuasion; la GRC à Yellowknife effectue des patrouilles conjointes avec d'autres organismes partenaires sur les lacs et rivières. Les trois que l'on a faites l'été dernier ont été fructueuses.

Une fois, alors que la patrouille mixte était sur le point de débuter, la Garde côtière d'Iqualuit a signalé un bateau en détresse sur le Grand lac des Esclaves. Durant les efforts de recherche et de sauvetage, nous avons pu aider les garde-côtes auxiliaires à localiser six enfants et deux adultes et à les ramener jusqu'à Yellowknife.

La mutualisation des ressources matérielles et humaines permet de veiller au respect et à l'application d'une multitude de lois fédérales et territoriales sans imposer de contrainte excessive aux organismes participants.

En plus d'être bien perçues par le public et les leaders de la communauté, ces patrouilles sont l'occasion pour nos membres d'en apprendre davantage sur les responsabilités et pratiques des organismes partenaires, ce qui favorise l'interopérabilité, essentielle dans cette région.

La sécurité personnelle demeure la responsabilité de chacun, mais nos stratégies et efforts conjugués contribuent à sécuriser les activités récréatives à longueur d'année.

Cap. Sheldon Clouter

En tant que policier et passionné de VTT, j'ai toujours en tête la sécurité. J'essaie d'être proactif avec les autres VTTistes.

En Nouvelle-Écosse, nous avons de formidables associations de VTT qui orga-nisent des rallyes très courus. Les VTTistes se rassemblent et profitent de tout ce qu'offre la pratique de cette activité : des points de vue à couper le souffle et une faune abondante.

Notre présence à ces rallyes est un bon moyen d'assurer la sécurité des VTTistes et d'appliquer la Off-highway Vehicles Act et la Highway Traffic Act de la Nouvelle-Écosse, ainsi que le Code criminel.

C'est aussi l'occasion de sensibiliser ces amateurs aux différents aspects de la sécurité des VTT et aux lois applicables. La GRC peut ainsi nouer le dialogue avec les communautés et les citoyens qui s'adonnent à ces activités récréatives.

De leur côté, ces derniers sont rassurés de savoir que la GRC est présente sur les sentiers, équipée et prête à intervenir à tout moment.

Cap. Janet LeBlanc

Le bureau des Services de la circulation du Nord-Ouest est situé au Détachement de la GRC à Amherst, dans le comté de Cumberland (N.-É.).

Le comté possède un vaste réseau de pistes ouvertes à longueur d'année et très fréquentées par les randonneurs, les cavaliers, les VTTistes et les motoneigistes. Nous voulons que chacun puisse les emprunter en toute sécurité.

Notre équipe a conclu un partenariat avec le ministère des Ressources naturelles et des clubs locaux comme le Cumberland County Riders ATV Club. Nous avons rencontré leurs membres et écouté leurs préoccupations.

La GRC patrouille, seule ou avec d'autres organismes, les sentiers de la région à longueur d'année – en motoneige l'hiver et en VTT le reste de l'année.

Nous avons également installé des postes de contrôle sur les sentiers lors de certains événements. Nous couplons la sensibilisation à la répression.

La majorité des usagers respectent la loi et réagissent bien à nos actions; évidemment, il y en a qui enfreignent la loi et qui sont donc mécontents de nous voir. Ceux qui ont bu sont accusés de conduite avec facultés affaiblies. Durant une opération, nous avons même saisi un VTT volé.

Une de nos stratégies consiste à ériger des barrages à l'intersection d'un sentier et d'une route. L'avantage, c'est qu'on n'a pas besoin de véhicule récréatif dans ce cas – un véhicule de police suffit. Et ça fonctionne bien.

Nos membres adorent passer la journée sur les sentiers en VTT ou en motoneige. De manière générale, les usagers de véhicules récréatifs apprécient nos efforts et les organiseurs d'événements sont toujours contents de nous voir.

Cap. Cam Long

Pour de nombreux Canadiens, surtout en région rurale, conduire un VTT, une motoneige ou un bateau fait partie du mode de vie. Pour d'autres, c'est davantage une activité récréative.

Les policiers peuvent envisager diffé-rentes approches préventives.

On peut rejoindre la grande majorité des utilisateurs récréatifs en lançant des messages de sensibilisation clairs et cohérents. Et ces messages devraient émaner de plusieurs sources tout en allant dans le même sens. Les partenaires doivent s'unir pour bien les communiquer.

Toute initiative de sensibilisation du public devrait comprendre trois grands conseils : planifiez vos excursions, suivez la formation nécessaire et emportez les articles essentiels. Si tout le monde s'y tenait, il y aurait incontestablement moins d'accidents.

Le message doit être à la fois cohérent et opportun. Il est important de sensibiliser la population avant un long week-end, car les accidents sont habituellement plus nombreux, ou lorsqu'il y a un risque élevé d'avalanche par exemple.

D'expérience, je dirai que la majorité des incidents sont attribuables à une mauvaise planification, à un manque de formation ou à une méconnaissance du terrain ou de ses propres limites.

Il faut d'abord miser sur la formation. Tout le monde aurait avantage à suivre une formation de qualité, les novices comme les gens d'expérience.

Après, il y a toujours un pourcentage de la population contre qui il faut sévir – c'est pareil pour les conducteurs de VTT, les motoneigistes et les plaisanciers. Une répression efficace demeure un élément essentiel de la sécurité générale.

Les activités de répression sont aussi l'occasion de nouer le dialogue avec le public et de fournir un renforcement positif. Félicitons les conducteurs qui font bien les choses.

Enfin, les policiers devraient donner l'exemple. Pour projeter une image professionnelle et conserver la confiance du public, nous devons bien entretenir notre équipement et nos policiers doivent être bien formés, équipés et compétents.

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