Faire partie de la communauté LGBTQ2
Inspectrice Mia Poscente
Membre régulier, Mia est l'officière responsable de la Division O, Section des affaires spéciales « I », à Toronto. Elle s'identifie comme une femme gaie.
- Que représente l'acronyme LGBTQ2 pour vous?
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Bien sûr, je sais ce que chaque lettre représente, mais j'ai des sentiments mitigés à l'égard de cet acronyme. Je n'aime pas lorsqu'on me traite de « lesbienne », parce que durant mon enfance, ce terme était toujours utilisé de manière péjorative. Je préfère être qualifiée de personne gaie ou queer.
Au début, l'acronyme ne comportait que quatre lettres : LGBT. Au fil des années, il a été élargi et je comprends tout à fait l'intérêt de le faire. Le monde évolue et la langue évolue, il est donc important que l'acronyme reste inclusif et pertinent. La seule chose qui me dérange dans ce changement, c'est la crainte d'un possible retour de bâton. Certaines personnes sont agacées par le fait de devoir se familiariser avec une nouvelle version pour s'assurer qu'elles n'offensent personne ou ne se mettent personne à dos. Certaines personnes lèvent les bras au ciel et se demandent pourquoi nous avons besoin de ces étiquettes. Ne sommes-nous pas tous des gens ordinaires? Ils ont peur de dire ce qu'il ne faut pas et d'offenser alors qu'ils n'en ont pas l'intention. Ils veulent sincèrement être inclusifs, mais ils ne savent plus quoi dire parce que nous changeons sans cesse d'acronyme. Je comprends les deux côtés de la médaille.
Je fais partie du Comité consultatif sur l'égalité des genres et le harcèlement (CCEGH) de la Division O. Je fais aussi partie d'un réseau LGBTQ2 informel. Nous voulions un terme plus simple que nous pourrions utiliser en interne, et avons décidé que « Queer Network » (Réseau Queer) serait une bonne formulation pour englober le tout. Bien sûr, il y a des gens qui trouvent le terme « queer » offensant. Vous ne pourrez jamais satisfaire tout le monde. J'aime dire PLU... People Like Us (Des gens comme nous).
- En tant qu'employée de la GRC, quelle a été votre expérience en tant que membre de la communauté diversifiée sur le plan du genre?
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Dans l'ensemble, je me suis sentie valorisée et respectée, mais j'ai aussi eu des difficultés.
J'ai débuté ma carrière policière à la Peel Regional Police en 1988. À cette époque, être une personne gaie n'était pas cool. Je me cloisonnais et restais secrète, c'était une façon difficile de vivre ma vie. À partir de 1995, j'ai passé cinq ans à travailler sur une opération policière conjuguée avec la GRC et, pendant cette période, j'ai été immergée dans la culture de la GRC. J'ai rencontré d'autres personnes gaies qui ne s'en cachaient absolument pas, ce que j'ai trouvé remarquable. Lorsque je suis entrée à la GRC en 2001, j'assumais totalement qui j'étais et ce n'était pas un problème. Être moi-même au travail était merveilleusement libérateur. La GRC a été le premier organisme fédéral à permettre aux partenaires de même sexe de partager les pensions et autres avantages sociaux. Ce que je n'avais pas réalisé à l'époque, c'est que ce n'est pas parce qu'une organisation a des politiques d'intégration en place que toutes les personnes qui travaillent pour elle partagent ces mêmes valeurs d'ouverture d'esprit. J'étais un peu naïve. Je me sentais bien dans ma peau et mes amis acceptaient le fait que je sois moi-même, mais d'autres membres de la GRC ne voyaient pas les choses de la même façon. Je ne l'ai pas fait savoir, mais je suis sûre que j'ai froissé certaines personnes.
Lorsque mon épouse et moi nous sommes mariées le 16 juin 2005, nous étions le premier couple de même sexe à nous marier à la GRC et j'ai eu de la difficulté à trouver une garde d'honneur pour notre cérémonie. Pour les membres réguliers masculins, on leur aurait fourni des lances du Carrousel et des gardes d'honneur, mais il a été difficile pour nous de prétendre à la même chose. Finalement, notre garde d'honneur était composée de deux membres réguliers qui étaient des amis à nous, et nous avons dû aller au mess de la DG de la GRC pour décrocher une lance du mur. Nous avons eu une belle cérémonie, mais je pense que si l'une de nous avait été un homme, les choses auraient été plus simples.
De 2006 à 2007, j'ai été mentor en recrutement et ce que je voulais vraiment faire, c'était porter ma tunique rouge et prendre part au défilé de la Fierté de Toronto. J'ai soumis une demande et on m'a dit qu'elle ne serait pas approuvée parce que les membres réguliers ne sont autorisés à porter la tunique rouge que lors des défilés de la fête du Canada et du jour du Souvenir. J'ai trouvé cela étrange parce que je me souvenais avoir vu des membres défiler dans les parades de la Saint Patrick et du Père Noël. J'ai vraiment eu du mal à avaler la pilule. Je trouvais cela injuste et la raison qu'on m'a donnée me semblait très mauvaise, alors j'ai trouvé un moyen de contourner le problème. Grâce à mes relations dans le domaine du recrutement, j'ai fait en sorte que le Bureau du recrutement de la Région du Centre installe un kiosque au défilé de la Fierté de Toronto. La GRC n'a pas défilé, mais nous étions présents et visibles pour la toute première fois et nous avons eu beaucoup de succès. Nous avons suscité de nombreuses demandes de la part de la communauté. J'ai fait grincer des dents, j'ai fait sourciller et je me suis peut-être même fait quelques ennemis. L'année suivante, nous avons reçu l'autorisation de participer au défilé de la Fierté en uniformes de travail. Je vois toujours cela comme une victoire.
Nous devons montrer aux gens que nous donnons à chacun les mêmes droits et les mêmes possibilités. Je n'ai aucun problème à prendre part au défilé de la Fierté comme monsieur et madame Tout-le-Monde, mais le fait de défiler en uniforme envoie un message puissant et positif.
Au fil des années, les dirigeants de la GRC qui avaient des opinions conservatrices ou carrément homophobes ont manqué de belles occasions de relations publiques, sans parler des marchés inexploités de recrues potentielles. Les temps ont bien changé. Nos recruteurs proactifs reconnaissent désormais l'intérêt d'atteindre des communautés diverses. J'étais prête à repousser les limites, même si je savais que je m'exposais à des critiques. J'ai connu des moments difficiles, mais cela en valait la peine.
- Dans quelle mesure est-il important d'avoir des alliés?
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C'est probablement la chose la plus importante qui soit. Je peux sauter en l'air et dire « Hé, regardez-moi, je suis gaie, je suis marginalisée, traitez-moi bien! ». Pour certaines personnes, plus je parle de moi, plus je ne suis qu'une personne agaçante et cela justifie le fait qu'elles ne m'aiment pas en premier lieu. Si quelqu'un d'autre qui a de la crédibilité et de l'autorité dans l'organisation agit en tant que porte-parole, il est pris plus au sérieux, car il est considéré comme objectif.
Les alliés ne sont pas accusés d'avoir une idée derrière la tête, d'essayer de prouver quelque chose ou d'avoir un intérêt particulier. Ils soutiennent la communauté diversifiée sur le plan du genre pour la raison la plus honnête et la plus bienveillante qui soit : parce que c'est la bonne chose à faire. Ces dernières années, je suis devenue une alliée de la communauté trans. Alors que le compteur de tolérance sur l'échelle de l'inclusivité grimpe, la communauté transgenre reste à la traîne. Ils ont encore du mal à être acceptés, même dans les lieux de travail inclusifs. Consciente de cela, j'ai essayé de jouer un rôle de défense des droits de la personne. Si je peux faire quelque chose pour faciliter la vie de quelqu'un d'autre, je le ferai. Comment pouvez-vous maltraiter quelqu'un simplement pour ce qu'il est?
- Pensez-vous qu'il est important pour la GRC de faire de l'éducation et de la sensibilisation sur la communauté LGBTQ2?
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Absolument. J'espère qu'un jour arrivera où il ne sera plus important pour la GRC d'offrir une formation de sensibilisation, mais pour l'instant, c'est essentiel.
Je viens de terminer le cours de sensibilisation de la GRC, que j'ai trouvé fantastique. Bien que ce cours puisse être bénéfique pour quiconque, il s'adresse particulièrement aux personnes qui ne savent pas comment se comporter avec les membres des communautés diversifiées sur le plan du genre. Entre autres choses, il leur fournit un langage plus inclusif. La section du glossaire aidera de nombreuses personnes. Elles seront capables d'avoir des conversations et de gérer des situations qui leur auraient été difficiles auparavant. Les alliés ne voient pas d'inconvénient à suivre des cours comme celui-ci, car ils soutiennent et adhèrent déjà à ce type d'initiative. Malheureusement, il y a encore beaucoup de personnes au sein de cette organisation qui resteront réfractaires, quoi qu'il arrive. Même rendre un cours comme celui-ci obligatoire ne changera pas l'attitude de certaines personnes.
En tant qu'individu ou organisation, peu importe que vos intentions soient bonnes, vous ferez toujours des erreurs. Lorsque cela se produit, vous vous corrigez, vous vous excusez et vous passez à autre chose. Je crois que la GRC veut que les gens se sentent appréciés et respectés et je pense que nous sommes aujourd'hui sur la bonne voie.
Jean Turner
Travaillant à London, en Ontario, à titre de membre civile, Jean est une femme qui s'identifie comme queer ou lesbienne.
- Qu'est-ce que l'acronyme LGBTQ2 signifie pour vous?
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Pour moi, mis à part la signification des lettres, le sigle représente un groupe diversifié de personnes dans le spectre des identités de genre et des orientations sexuelles. La communauté LGBTQ2 comprend des personnes de toute ethnie, religion et culture.
- En tant qu'employée de la GRC, quelle a été votre expérience comme membre de la communauté diversifiée sur le plan du genre?
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Lorsque j'ai intégré la Gendarmerie royale du Canada (GRC) en 2002, j'étais mariée à un homme. En 2009, j'ai révélé mon orientation sexuelle au travail et, à ce moment-là, j'ai senti le soutien de tous les membres, ce qui est encore le cas aujourd'hui. La seule expérience négative que j'ai vécue a été le moulin à rumeurs. Peu de temps avant que je révèle mon orientation sexuelle, une de mes collègues répandait la rumeur selon laquelle j'étais gai. J'ai alors eu une conversation en tête à tête avec elle afin de lui dire que cela concernait ma vie privée et qu'elle ne devrait pas émettre de telles suppositions. Nous avons eu une bonne conversation, et celle ci m'a présenté ses excuses. À part cela, je n'ai eu aucun problème. Je me suis toujours sentie en sécurité et appuyée au sein de la GRC, et j'ai pris part aux activités de nombreux comités de diversité. Je remplis actuellement les fonctions de présidente du réseau des employés LGBTQ2. Je fais beaucoup de travail de sensibilisation sur la communauté dans les services de police, plus particulièrement en Ontario. Cela a permis d'ouvrir un monde de possibilités dont je ne connaissais pas l'existence.
- Quelle est l'importance de l'alliance inclusive?
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Les alliés sont extrêmement importants. Dans le milieu de travail, lorsqu'un collègue hétérosexuel ou cisgenre interpelle une autre personne concernant un mauvais comportement ou une blague inappropriée, cette façon de faire est très bien accueillie parce que le collègue n'est pas perçu comme une personne ayant un motif personnel de critiquer le comportement de la personne concernée. Ce collègue est vu comme étant principalement motivé par la bienfaisance, par conséquent son soutien est considéré comme indispensable.
- À votre avis, est-il important pour la GRC d'éduquer et de sensibiliser les gens au sujet de la communauté LGBTQ2?
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Oui, la sensibilisation et la formation sont essentielles pour assurer la sécurité des agents et des membres de la communauté parce qu'elles contribuent à prévenir la haine et la violence. Cela est extrêmement important dans les services de police. J'ai récemment suivi le cours de sensibilisation sur la communauté 2SLGBTQ+ de la GRC qui, à mon avis, était très intéressant. À la fin du cours, je me suis sentie très émotive parce que le cours expose concrètement les luttes personnelles et professionnelles auxquelles font face les membres de la communauté 2SLGBTQ+. Le cours permet de puiser profondément dans nos expériences vécues et d'aborder des sujets comme l'empathie, le soutien et l'importance d'être un allié.
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