Bev Busson, celle qui a ouvert la voie aux femmes
Bev Busson était une nouvelle enseignante de Dartmouth, en Nouvelle-Écosse, lorsque, le 23 mai 1974, en route vers son emploi d'été auprès d'enfants ayant des besoins particuliers, elle a entendu, à la radio, que la GRC allait accepter les candidatures de femmes.
Comme elle passait à proximité du détachement local, elle a pris un formulaire de demande. « C'était le destin qui m'emmenait sur un autre chemin », confie-t-elle.
En moins de quatre mois, la jeune Bev MacDonald, alors âgée de 23 ans, devenait policière assermentée à Regina et comptait parmi 31 autres femmes qui, ensemble, formaient la Troupe 17, première troupe féminine de la GRC.
Elle était loin de se douter que, trente ans plus tard (fin 2006), au terme d'une carrière stimulante et riche en expériences, elle serait nommée première femme commissaire du service de police national.
Devant les choix de carrière limités qui s'offraient aux femmes au début des années 1970, Mme Busson a opté pour l'enseignement parce qu'elle voulait influencer positivement la vie des autres. « La GRC m'a tout à fait donné cette possibilité, mais à plus grande échelle », précise-t-elle.
La création de la Troupe a provoqué une tempête médiatique à l'École de la GRC (Division Dépôt). « Nous voulions juste être traitées comme les autres, mais il y avait toujours une équipe de journalistes qui se ruait vers nous », se souvient Mme busson en riant. « Nous sommes très vite devenues très proches. »
Si proches qu'elles ont l'habitude, depuis 40 ans, de se retrouver tous les cinq ans. « Ce sont des femmes formidables qui ont toutes fait tomber des obstacles et suivi des carrières si diverses et intéressantes », raconte-t-elle.
Fraîchement sortie de la Division Dépôt, Mme Busson s'est vu affecter à Salmon Arm (C.-B.), un petit village de l'intérieur sud de Shuswap Lake – la même région où son époux et elle ont choisi de passer leur retraite.
Au début, elle a éprouvé certaines difficultés, notamment à trouver un logement. Elle rit en disant que les nouveaux membres masculins s'installaient toujours au Gabe's Bunkhouse, ce qui était inapproprié. Les premières semaines, elle était « une sorte d'attraction touristique » : tout le monde était curieux de voir la nouvelle gendarme.
En revanche, l'accueil a été chaleureux, et, dès le premier jour, elle « se jetait dans l'aventure ». « J'ignore si (le chef du détachement) croyait au rôle des policières ou non, mais je ne recevais aucun traitement de faveur », se souvient-elle en affirmant que, tout comme les hommes, elle a fait sa part de quarts de nuit, seule de service, les plus proches renforts étant dans le détachement voisin ou à la maison.
Il a fallu 13 ans à Mme Busson avant de pouvoir goûter à sa première promotion au grade de caporal. Avec un petit sourire, elle dit qu'elle avance à son rythme, mais c'est durant cette période qu'elle a gagné l'expérience des enquêtes qui allait constituer la base du reste de sa carrière. Elle s'est distinguée dans le milieu des enquêtes criminelles. Après seulement deux ans dans les services généraux, elle est passée à une section antidrogue avant de se lancer dans les enquêtes sur les crimes majeurs, à savoir la fraude, le trafic de drogues et les crimes graves, dont les agressions sexuelles et les homicides.
En 1990, elle avait décroché un diplôme en droit et assumait des fonctions administratives à titre d'avocate dans les affaires internes. Deux ans plus tard, elle devenait première femme promue à un poste d'officier breveté au grade d'inspecteur et, comme sa passion des enquêtes criminelles lui manquait, elle est retournée au secteur opérationnel.
« J'ai eu beaucoup de chance de tomber sur des patrons merveilleux pour qui le fait d'être femme ne posait pas de problème », répond-elle, interrogée sur son parcours. « Ils voulaient tout simplement qu'on travaille dur, ce que je faisais avec joie. »
Tout au long de sa carrière, elle a vécu neuf mutations entre la Saskatchewan, la Colombie-Britannique et l'Ontario (Ottawa). Elle a épousé un de ses collègues, veuf et père de deux enfants en bas âge qu'elle a adoptés. Sa fille est aujourd'hui policière à la GRC en Colombie-Britannique.
« Je répète sans cesse à ma fille que chaque jour est une occasion d'influencer favorablement la vie de quelqu'un et que la réussite devrait être mesurée à nos contributions et à la perception des autres à l'égard de notre leadership et non de notre statut dans la hiérarchie », affirme-t-elle.
Saviez-vous que…
Bev Busson a gravi tous les échelons de la GRC en cumulant les « premières ». Parmi ses exploits :
- Première femme promue à un poste d'officier breveté, au grade d'inspecteur en 1992
- Première femme officière responsable des enquêtes criminelles, essentiellement n° 2 de la division (Division F, Saskatchewan), en 1997
- Première femme au grade de commissaire adjoint et au poste de commandant divisionnaire (Division F) en 1998
- Première femme sous-commissaire à une région (Pacifique) en 2001
- Première femme à la tête de la GRC et 21e commissaire en décembre 2006
Montée à la tête de la Division E en 2000, elle a supervisé certaines des plus tristement célèbres affaires de la GRC, notamment les dernières étapes de l'enquête sur l'attentat à la bombe contre le vol 182 d'Air India en 1985 et l'affaire du tueur en série Robert « Willie » Pickton, contre qui pesaient 26 chefs d'accusation de meurtre au premier degré et qui a été reconnu coupable de six chefs d'accusation de meurtre au deuxième degré.
En 2006, elle planifiait sa retraite lorsqu'on lui a proposé le poste de commissaire, à un moment où la GRC traversait une période pleine de défis. Elle a accepté d'assumer ce rôle de façon intérimaire.
« C'était un honneur et un privilège pour moi », dit-elle humblement. Songeant à sa carrière, les meilleurs souvenirs qu'elle en retient sont ceux de ses collègues et du « véritable esprit de camaraderie et de confiance mutuelle qui s'est installé – c'est tout ce qui compte ».
Sa plus grande fierté, elle la tire du moment où les membres de la GRC, policiers et civils, l'ont acceptée comme dirigeante alors que l'organisation était la cible de nombreuses pressions, critiques et remises en question.
Mme Busson cite un dicton préféré – qu'on attribue à plusieurs personnalités, de Theodore Roosevelt au gourou du leadership John C. Maxwell – pour décrire sa conception du leadership : « Ce que vous savez compte peu pour les gens, jusqu'à ce qu'ils sachent à quel point ils comptent pour vous ».
Des mots simples venant d'une dirigeante respectée qui, aux côtés des membres de la Troupe 17, a ouvert la voie à des milliers de femmes à la GRC.
Lisez les articles intitulés « Gros plan », « Premières féminines » et « Voici la Troupe 17 »
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