Dans Internet, les criminels agissent dans l'anonymat, ce qui complique les cyberenquêtes policières. Pour maintenir une longueur d'avance sur les criminels, le Collège canadien de police (CCP) à Ottawa a ajouté un nouveau cours à son programme : le Cours d'enquêteur sur la cybercriminalité (CEC).
Inauguré en 2016, le cours de dix jours inculque les aptitudes nécessaires pour mener une cyberenquête approfondie. On y aborde les cas où la technologie est ciblée, comme l'utilisation non autorisée d'un ordinateur, les méfaits à l'égard de données informatiques et le piratage.
« En acquérant une idée générale des concepts et des technologies en cause dans leur enquête, les policiers peuvent déterminer ce qu'il faut saisir et conserver, et comprendre les cas où il faut agir rapidement », explique le serg. Nicolas Bernier, instructeur principal en cybercriminalité au CCP.
Le gend. Scott Noseworthy, enquêteur à la GRC en Alberta, a suivi le cours plus tôt cette année. Il estime avoir acquis une information précieuse qui l'a aidé à résoudre une affaire de rançongiciel – un programme malveillant qui bloque l'accès à un système jusqu'au versement d'une somme d'argent.
« Après avoir suivi le cours, nous avons été saisis d'un cas important de la part du responsable d'une infrastructure essentielle, et nous avons pu intervenir avec efficacité, précise-t-il. Conscients des ressources disponibles, nous avons coopéré avec d'autres services de police de façon à favoriser le dénouement de l'enquête et à mieux assister les victimes. »
Familiarisation avec la technologie
Les activités cybercriminelles sont en hausse au pays, selon les derniers chiffres de la GRC. En 2013, celle-ci a recensé environ
4 400 incidents, soit 40 p. 100 de plus que les 1 300 cas signalés en 2011. Cette montée de la cybercriminalité a incité le CCP à actualiser ses cours et à en créer de nouveaux à l'intention des policiers étrangers et des partenaires fédéraux.Le CEC est le dernier en date offert par l'Institut d'apprentissage en criminalité technologique au CCP. L'Institut offre 14 cours dans un éventail de domaines (expertise judiciaire numérique, technologie et cybercriminalité) pour les agents de la GRC et d'autres services de police, ainsi que les employés civils assumant des fonctions de renseignement ou d'enquête.
Ces différents programmes, cours et ateliers offrent deux champs de spécialisation : le premier pour les enquêteurs cherchant à raffiner leurs méthodes d'enquête sur les crimes dans Internet, et le second pour ceux désirant se spécialiser dans l'expertise judiciaire numérique, ou l'analyse et l'extraction de données d'appareils numériques. Chaque cours couvre également les notions d'application de la loi à l'ère de la technologie.
« Si certaines notions traditionnelles de perquisition et de saisie s'appliquent, nombre de cas mettent en cause de nouvelles technologies, souligne le serg. Bernier. Il importe pour les membres de savoir immédiatement l'orientation à donner à leur enquête, car les preuves peuvent être éphémères – et disparaître à jamais si on ne les relève pas sur-le-champ. »
Pour une intervention efficace
Le CEC est enseigné par le serg. Alex Baron, instructeur principal en cybercriminalité à la GRC. Il est appuyé par quelque 20 spécialistes, dont des représentants du FBI.
« Le cours est l'occasion de nouer des contacts très importants dans le cyberespace, précise-t-il. Il faut unir nos forces afin d'élaborer un mode d'opération commun et concerté. »
Le serg. Baron et les autres experts offrent aux participants des scénarios pragmatiques qui leur permettent de recueillir de l'information ensemble. Dans de nombreux cas, les pirates laissent une piste numérique; le serg. Baron apprend aux enquêteurs à relever cette piste et à poser les bonnes questions pour résoudre l'affaire.
Depuis le cours, le serg. Noseworthy a travaillé à plusieurs dossiers et il confirme la valeur de mieux connaître les subtilités d'Internet et de la technologie en cause.
« Le cours nous enhardit à aborder les enquêtes cybercriminelles et nous donne les outils pour affronter non seulement les crimes banals comme la fraude de 200 $ contre grand-mère, dit-il, mais aussi les cas d'envergure ciblant les grandes entreprises et les infrastructures essentielles à l'échelle du pays; le policier doit désormais être rompu à ce genre d'enquête. »